Abadennou.fr
Auteurs d'ici et d'ailleurs
Site officiel de la poétesse
Silviane Le Menn
En langue bretonne "abadennoù" est le pluriel de "abadenn" qui signifie : affaire, partie (de jeu), séance, représentation (théâtrale), instant, moment.
 
 
Silviane Le Menn, webmaster
 
 
 

 

 
 
 

 

 
 
 
 
 
Index | Accueil | Liens | Partenaires | Contact
 
 
 
 
GRAIN DE SEL SUR LA MÉTÉO
Comment j’ai arrêté la pluie sur Quimper !
 
 
Samedi 6 juin 1998
Pouvoirs sorciers

18 heures :
Je quitte le Salon du Livre Rural qui se déroule au Musée des Champs,
à Saint Ségal, à quelques kilomètres de mon domicile.

Je viens de faire la connaissance de Dominique Camus, écrivain, peintre
et ethnologue, membre de l’Association des Écrivains Bretons dont je suis moi-même un membre peu assidu, étant de nature très indépendante...

Il vient de me dédicacer son livre « Pouvoirs sorciers », une enquête sur les pratiques actuelles de sorcellerie en Haute Bretagne.

Il est particulièrement souriant. Il a de drôles d’yeux bleus acier qu’on pourrait qualifier d’hypnotiques !

Il pleut. Je me suis vêtue chaudement : un tee-shirt, deux tricots de laine, des socquettes chaudes et surtout, mon ciré jaune flashy – style marin-pêcheur – pour faire soleil dans ma tête malgré le temps frais plus que maussade pour la saison.
Quimper, la cathédrale

19 heures :
Je viens d’arriver à Quimper, avec difficultés je trouve une place de parking le long de l’Odet.

Un homme m’agresse et m’insulte, je suis choquée - ça commence bien ! Il croyait que j’allais me garer sur l’emplacement réservé aux handicapés, alors que je manœuvrais pour faire demi-tour ! Pas toujours pratiques les parkings !

Place de la Résistance, tout est prêt pour la grande fête « Coup
de torchon - Africa noz »
. Surtout depuis mes séjours au Cameroun (1994) et en Martinique (1996, 1998), j’aime vraiment tout ce qui touche de près ou de loin à la culture africaine dont prioritairement la musique, le rythme...
Cameroun, 1ère communion, évêque africain

Quand je dis « tout est prêt », oui... mis à part le temps, empêcheur de tourner en rond. Il pleut, ma doué ! il pleut, qu’est-ce qu’il pleut ! Mon ciré bouton d'or brille et dégouline malgré la protection de mon parapluie bleu-marine à liseré rouge sur lequel on peut voir le logo « France 2 ». Un cadeau de Danièle L., la belle martiniquaise qui y travaille, aux infos...

Place de la Résistance
, il n’y a pas grand monde. Je suis venue seule. Je ne connais personne.
Je tourne, je vire. Je m’approche du barnum où est installée la sono. Quelques techniciens s’affairent. Une femme brune, baroquement vêtue, autoritaire et décidée, va et vient, très affairée, volubile. Je ne la connais pas. J’observe la grande scène gorgée d’eau : les micros, les haut-parleurs, les spots sont protégés par de grands sacs poubelles en plastique noir et autres bâches imperméables.
Triste spectacle ! Histoire de faire patienter le rare public, une musique enregistrée se diffuse humidement. Les animateurs et les futurs spectateurs font une moue dubitative, perplexes : il pleut ! Quelle poisse ! C’est la chkoumoune !

Cameroun, route de Yaoundé à Douala

19 h 30’ :
Il pleut toujours et encore. Consternation.
Le public arrive par petits groupes, harnachés de K-Way, casquettes, imperméables, parapluies.

Je me suis postée près du barnum-sono. J’attends.
Un jeune homme à ma gauche. Je le regarde. Il me regarde.

Je lui demande : – Croyez-vous que le spectacle va avoir lieu ?
Il me répond : – Je ne sais pas, j’espère que oui.
Je rétorque : – Ça va commencer à quelle heure ?

Il répond : – Je ne sais pas. On est comme vous, on est tous pareils, on attend. Ça dépend de la pluie, cela commencera si la pluie s’arrête, car ne n’est pas possible d’utiliser tout ce matériel électrique sous la pluie, c’est trop dangereux. Malheureusement, la pluie n’a pas l’air de vouloir s’arrêter. Alors, je ne sais pas... à moins que vous n’ayez un don pour faire cesser la pluie, sinon... je ne sais pas du tout...

– Étonnée, je lui réponds, le regardant dans les yeux : – Justement, oui, j’ai aussi un don pour faire venir la pluie et également pour faire cesser la pluie ou la tempête, détourner les cyclones... Mais c’est beaucoup plus facile pour moi de faire venir la pluie... pour l’arrêter, c’est une autre paire de manches... il est indispensable que je sois très motivée, car il faut beaucoup d’énergie pour réaliser cette manipulation météorologique... Justement, ce soir, je suis très motivée car j’ai fait 30 kilomètres pour assister à ce spectacle et surtout, j’ai mal au coeur pour les bénévoles qui se sont donnés tout ce mal, qui ont travaillé pour tout mettre en place. Ça me contrarie vraiment que leurs efforts soient gâchés par la flotte.

Il dit : – Ah ! Bon ! Vous pouvez faire cesser la pluie ?
Je réponds : – Oui... oui... Mais je ne vous garantis rien, on ne peut jamais être sûr à l’avance, on ne peut être certain de maîtriser tous les paramètres. Je peux toujours essayer.

Je m’éloigne de barnum réservé au matériel de sonorisation, je tourne le dos au jeune homme et je commence à me conditionner psychologiquement, je me concentre consciencieusement. Je décide de capter les énergies nécessaires dans les gros câbles électriques qui sont par terre. Je place mes pieds sur les câbles, je rectifie l’équilibre, la position des genoux et du bassin, je commence à pratiquer la respiration profonde, je regarde le ciel.
Ma doué (mon dieu, en langue bretonne !) , que ce ciel est bouché ! Le plafond est bas... mais bas !

Je fais face à la scène. Ça y est, je suis en résonance avec « l’esprit » des nuages, mon corps astral est en communication avec « l’esprit » de la pluie ; je pousse les particules gazeuses et liquides agglomérées, je débrouille les nimbus et les cumulus de la même manière que je débrouillerais une pelote de laine emmêlée, je déstructure et désintègre la masse nuageuse. Je suis parfaitement concentrée afin que la pluie s’arrête, que la fête puisse avoir lieu, que tout le monde soit content, que l’association organisatrice puisse récolter les fonds dont elle a besoin pour ses oeuvres humanitaires. Pourtant, il ne m’est pas facile de me concentrer correctement dans la position « debout », je préfère la position « assise » qui permet d’être plus détendue : on ne gaspille pas d’énergie à tenir en équilibre ! J’ai perdu la notion de l’environnement technique et humain. J’ai perdu la notion du temps ! Je suis hyper concentrée : je veux réussir à faire cesser la pluie !

Tiens ! Voilà qu’à force de condenser mon souffle pour diriger les nuages, ils se mettent à bouger, un petit vent de dégagement s’est levé. Je souris, contente. On dirait que ça marche ! Tiens ! Des mouettes dans le ciel. Hop ! j’accroche les nuages et les gouttes de pluie aux ailes des mouettes en leur demander d’expédier tout ça au loin, très loin, par la mer, vers un pays de terre sèche. Je remercie « l’esprit » des mouettes pour le service.

Tiens ! on dirait que la pluie devient plus fine. Mais non ... je ne rêve pas... la pluie a bien diminué... la pluie faiblit. Oui... oui... je peux enfin fermer mon parapluie : je le secoue très énergiquement afin d’en éliminer l’eau tout en me concentrant afin que cette eau s'en aille et surtout ne revienne pas.

La dame brune se présente sur scène, elle s’appelle Fatima, c’est la chef.
Elle dit : – Ne vous inquiétez pas, la pluie va s’arrêter, le spectacle va commencer dès que possible.

Je continue ma besogne car je veux que la pluie cesse totalement. Intuitivement, je tourne la tête vers la droite et mon regard s’arrête sur un petit groupe de personnes dont le jeune homme qui me demandait si, par hasard, je n’aurais pas un don pour arrêter la pluie. Ils me regardent tous fixement
et j’entends :

– C’est la dame là-bas, avec le ciré jaune.

Ciré jaune de chez Cotten
Je détourne la tête, gênée et je continue à me concentrer, toujours les pieds bien ancrés sur les câbles électriques et les mains serrées sur mon parapluie humide et fermé.
C’est ainsi que j’avais réussi – à l’hippodrome de Longchamp à Paris – à faire gagner la course au cheval « Dom Troy », un « toquard » acheté par mon ami Dominique André B. selon mes conseils extralucides ! Le parapluie fermé s’était ouvert tout seul, comme une explosion et le cheval avait passé la ligne d'arrivée au grand dam des turfistes !

C’était une expérience fantastique !
Ça m'avait donc valu un gain au P.M.U., modeste car j'avais parié trop raisonnablement. Ayant tenu à me gratifier d'un généreux pourboire,
le propriétaire du cheval gagnant eut les honneurs inespérés de la presse spécialisée qui titra
« Un toquard à la fête ». Inutile de dire que la cote du cheval grimpa en flèche et fut aussitôt revendu un bon prix ! On peut parier qu'il ne gagna jamais une autre course par la suite !
 
5 juin 2015 - Rectificatif apporté par mon ami Dominique André B. après lecture
de ce paragraphe :
Pour Dom Troy, je dois dire un mot pour lui. Ce n'était pas véritablement un toquard,
car il a eu son heure de gloire à Chantilly, mais il a eu un claquage musculaire
qui l'a complément arrêté au moins un an.
Par ailleurs, le jour de la fameuse course à Auteuil, il a bénéficié d'un terrain lourd optimum
pour lui car c'était dans le jargon hippique un "nageur" très à l'aise dans les terrains spongieux
car il avait d'énormes sabots.
Les autres courses le terrain était plus léger, ce qui ne l'avantageait pas voire le désavantageait.
Cela n'enlève au rien au mérite que tu as eu de l'encourager fortement en pensée,
d'où cette brillante victoire...encore merci.

Ah ! ça y est... les nuages filent à bonne allure maintenant ! Tiens ! on dirait qu’il fait moins sombre, mais oui... oui... je ne rêve pas... le temps s’est éclairci... Tien ! ça brille même, là-bas !

J’enlève la capuche de mon ciré : il ne pleut plus !!!... Machinalement, je me retourne, dos à la scène, je constate avec joie qu’entre-temps la place est devenue noire de monde. Le plus extraordinaire : en face, entre deux grandes cheminées d’immeubles se découpant en ombre chinoise, ma doué (mon dieu, en langue bretonne !) , incroyable mais vrai, le soleil du soir, magnifique, magique, superbe ! Quel bonheur !!!... Le soleil !!!...

Le ciel – qui, de gris souris est passé au bleu extra pur – se dépêche de se débarrasser des derniers nuages argentés et met à la place quelques petites touches de nuages blancs par ci par là, juste pour faire plus élégant. Les oiseaux contents, les parapluies fermés, les capuches abandonnées, les visages détendus : à ce tableau Fatima rit, roucoule et gesticule, elle crie dans le micro, elle est euphorique. On débarrasse prestement le matériel des bâches et sacs plastique, on allume les spots qui exhalent des fumerolles de vapeur, on règle la sono...

– Que la fête commence ! Musique ! s’enthousiasme Fatima dont le moral a remonté en flèche.
Moi, je souris aux anges, ravie de ma B. A. (bonne action !).
– Il est quelle heure ?
– Je ne sais pas.
J’eus la réponse à cette question le lundi suivant :
d’après le journal, il était deux heures plus tard...

Le lundi matin 8 juin 1998, dans le quotidien « Le Télégramme de Brest et de l’Ouest »
on pouvait lire en gros titres, tout en haut de la page 8 :
« Coups de torchon » échappe au naufrage
 

Un miracle s'est produit samedi soir place de la Résistance.
Les dieux de l'Afrique étaient avec Fatima, l'organisatrice de la 7ème édition de
« Coups de torchon » qui ouvrait sa scène et ses animations au Cameroun,
au Rwanda et à de nombreuses associations.

Sous un ciel enfin dégagé, 5 000 personnes ont participé à une fête gratuite de l'amitié et de la solidarité. Une grande et belle animation populaire que saul "Coups de torchon", dans ses deux rendez-vous annuels, est capable de créer.

Pas grand monde n'y croyait pourtant au succès de la fête dans la soirée de samedi. A partir
de 18 h, toute la ville était enveloppée dans un lourd crachin. Le vrai, le breton qui, quand il s'installe, dure des heures et des heures et qu'aucun souffle d'air ne permet de chasser vers d'autres horizons. Déjà il était trop tard pour envisager un repli de la scène, de la sono, des éclairages et de tous les stands vers le Pavillon.

Visionnaire

A 19 h 30, la place de la Résistance ne menaçait pas d'être engloutie sous les eaux, mais la forêt de parapluies ne présageait rien de bon. Interrogés sur un possible repli de la fête au Pavillon, Fatima tend le bras : "Regarde... tu vois... la pluie va cesser, c'est sûr et certain". Et de fait, deux heures plus tard le soleil pointait le bout de son nez. Ah ! Fatima, quelle visionnaire tu fais.
Grain de sel sur la météo !
OK ! Fatima est une VISIONNAIRE ! Peut-être... mais, et MOI alors ?
Bon d’accord... la journaliste (Françoise Salvert) ignorait ma présence sur la place de la Résistance... elle ne pouvait deviner mon action : avoir sérieusement
« travaillé » pendant 2 heures à tel point que la pluie ne m’a pas résisté !

Ça, elle ne le saura jamais… excepté si elle lit un jour ce récit !
 
Et pourtant, la PREUVE : je figure au premier plan sur la photo du journal
qui illustre son article ! Le hasard n’existe pas !
La journaliste m'aurait-elle crue si je l’avais contactée pour lui raconter mon histoire ?

Et vous, croyez-vous à mon aventure ?
 
 
 
 
 
© Silviane Le Menn
 
 
   
Google
Recherche sur le site www.abadennou.fr (un mot, un nom, une page)
   
  
Dernière mise à jour lundi 29.01.2018 16:38
 
© 2004 - 2018 - Tous droits réservés - L’enregistrement, l’impression et la reproduction de textes est autorisée notamment dans un but pédagogique et scolaire sous condition expresse de mentionner le nom de l’auteur
et de faire référence au site www.abadennou.fr
© Les droits photographiques appartiennent à leurs auteurs.Reproduction interdite sans autorisation
Photothèque Le Menn, VALDO photos, Quinson et divers.