|
|
|
|
|
|
LES BÊTES
(CE N'EST RIEN) |
|
|
|
|
Nuit sans lune en rase
campagne. Seule. Je roule, pleins phares. Voiture presque
aussi large que la route ! Une grosse masse
grise à quatre pattes traverse. Pas assez vite.
Elle passe sous la voiture. Choc. BOUM ! Peur. La bête est sûrement morte. Sûrement...
Pourquoi ne continuerais-je
pas ma route, comme si de rien n’était ?
Faire comme si de rien n’était, par peur…
de la nuit, du silence,
du danger imaginaire, de la bête
morte, du sang peut-être,
de l’ampleur des
dégâts…La bête ? Ni un lapin,
ni un chat,
ni un renard, ni un chien. |
|
|
– Sans doute une martre,
dit ma mère.
– Non, non, sûrement
un blaireau, dit Alain, grand chasseur devant l’éternel
!
En tout cas, morte, sûrement... |
|
– Vu l’ampleur
des dégâts, difficile de faire comme si de rien n’était, dit le garagiste, quel choc ! Le pare-choc avant droit est mort. Il y aura environ
pour 100 € de réparations.
Zut ! flûte et zut
! zut, zut et rezut ! Pas d’assurance pour une collision
avec une bête sauvage.
Je vais être de ma
poche ! J’enrage, peste soit des bêtes sauvages
qui ne respectent pas le code de la route ! |
|
|
Le lendemain |
En plein jour, sur la route des plages. Seule. Je roule dans
le soleil pâle
qui va se coucher dans une heure. Volant en rase-motte,
une masse grise traverse la route et percute la droite
du capot de ma voiture. Surprise. Choc. BING ! Peur. Embardée.
Mon capot va avoir une trace d’impact. Sûrement.
Je pense au garagiste ! Il faut bien qu’il gagne
sa vie ! |
|
|
|
L’oiseau est mort. Sûrement...
Bof
! Ce n’est rien qu’un oiseau, un petit oiseau,
un tout petit oiseau anonyme, un petit oiseau de rien du tout.
Pourquoi ne continuerais-je
pas ma route, comme si de rien n’était ?
Faire comme si de rien n’était… pressée
d’arriver à la mer pour
ne pas rater le superbe
coucher de soleil !
– C’était
quoi, comme oiseau ? |
|
– Je ne sais pas...
un oiseau ! Je ne connais pas tous les noms d’oiseaux.
Je n’ai pas étudié
les oiseaux. Et
puis, elle est tombée si vite, cette boule de plumes,
je n’ai pas eu le temps de voir les détails
anatomiques. BOF ! Ça ne fait rien, un oiseau c’est
un oiseau ! ce n’était rien qu’un banal
petit oiseau gris…suicidaire, un kamikaze !
Le pire,
c’est la facture du garagiste, la note va être salée ! |
|
|
Le lendemain |
 |
DINÉAULT
Nuit sur la route qui mène
au bourg. Presque minuit. Seule.
Je roule pleins phares.
Vive allure dans la descente, juste avant
le très
moderne demi-rond point anglais à la mode et le
très traditionnel calvaire en granit. Flash. Surprise
!
Quoi ? un sac en plastique blanc au milieu de la route.
Vite. Je ralentis. Je freine. |
|
— Don Diègue,
ôtes-moi d’un doute ! Et si ce n’était
pas un sac de plastique blanc, tout mou, gonflé
d’air ? Et si ce truc au milieu de la route était
quelque chose de dur ? Si c'est le cas, ma voiture
va
encore être abîmée. J’espère
que non... aïe... j’ai des doutes...
Trop tard pour freiner à mort. Tant pis ! Sûrement ce n’est rien. Choc. BOUM. Peur. Rien ?
J’ai juste eu le temps d’apercevoir
un gros paquet de fourrure blanche avec des yeux stupides,
un peu jaunes, qui me regardaient fixement. Faible lueur
de deux yeux ronds enchâssés dans
une tête
plutôt ronde surmontée de deux petits triangles
pointus. Une tête blanche et beige. |
|
— En un éclair,
tu as eu le temps de capter cette image ?
— Oui, comme un flash. Tu te rends compte ? Comme
s’il n’y avait
pas d’autre endroit que
le plein milieu du côté droit du C.D. 60 pour s’allonger à la minuit. Tu parles d’un
confortable canapé pour cette boule de poils !
— Le chat est mort sur le coup ?
— Sûrement. Mort, le chat, sûrement… Teinté de rouge, presque sûr.
— Tant
pis ! Comme si de rien n’était, je roule,
pressée d’aller dormir
au chaud sous ma couette
remplie de duvet d’oie 100 % d’origine naturelle.
— Peut-être
que c’était une chatte ? Elle était
à qui cette bête ? Peut-être à
une vieille dame solitaire ou malade qui va être
triste ?
— Je
ne sais pas. Je n’en sais rien.
|
|
|
Sûrement du sang sur la route, du sang de chat écrasé,
de chat crevé ! Bof ! Ce n’est rien,
la pluie
va laver. Quelqu’un va ramasser le chat mort, le
mettre dans un sac poubelle en plastique noir, le jeter
dans un profond conteneur en plastique gris en compagnie
des ordures ménagères enfermées dans
des sacs en plastiques bleus.
Bof ! Ce n’est rien, ce n’est qu’un chat, ça fera un de moins à courir par là.
Il y a beaucoup trop de chats. Les gens sont fêlés
avec leurs félidés, " gaga" avec
leurs canidés,
ces bestioles coûtent cher et polluent de plus en
plus notre environnement
avec leurs "cacas"
pléthoriques remplis de bactéries, virus,
etc...
Les gens sont obsédés par leurs chats,
leurs chiens. TROP c’est TROP !
Sept chats chez mes
voisins de droite.
Sept chats chez le couple du haut de
la rue, ceux qui n’ont pas pu avoir d’enfants.
Maintenant,
ils sont trop vieux pour continuer d’espérer
en avoir un jour.
Quatorze chats chez le vieux garçon
du bas de la rue qui a quitté sa ferme pour venir
en retraite au bourg.
|
|
|
En moyenne, à vue de nez, un ou deux chats dans chaque maison du bourg, sans parler
des chiens (famille des canidés).
Moi, je dis qu'il
y a de plus en plus de gens névrosés qui
sont atteints de « CANINOSE » chronique ou
aigue!
— Qu'est-ce
qu'on pourrait inventer comme mot pour baptiser
la passion
obsessionnelle des chats ?
— Je
ne sais pas… je donne ma langue au chat ! Regarde
dans
le dictionnaire.
|
|
— « CHAT : Petit mammifère carnassier généralement
domestique et de mœurs surtout nocturnes (famille des
félidés) »
— « FÉLIDÉ - félidé
ou félin n. M. (lat. felis, chat). Mammifère carnivore digitigrade à griffes rétractiles
et à molaires coupantes et peu nombreuses. (Les félidés
forment une famille comprenant le chat, le lion, le serval
- espèce de grand chat propre à l’Afrique
- , etc…) (Ordre des carnassiers)
— On pourrait dire
« FÉLINOSE ». Moi, je dis que les gens
sont fêlés, atteints de « FÉLINOSE ». |
|
|
CANINOSE et FÉLINOSE |
Voilà
! Deux nouvelles maladies.
La maladie de la misère
humaine, la maladie de la solitude
et du besoin de DOMINER un animal à défaut de pouvoir dominer les
autres ou se dominer soi-même.
Se sentir propriétaire,
se sentir le MAÎTRE d'un animal à défaut
d'être MAÎTRE de SOI, maître MAÎTRE de sa vie !
Se sentir supérieurà un animal "sans
parole" pour occulter ses complexes d'infériorité
peut-être ?
Pour occulter ses difficultés de
communication, son manque d'évolution spirituelle
?
|
 |
|
Osons... oui, oui...osons le dire, osons appeler un chat un chat ! Et l'AMOUR dans tout ça ?
Pour ces fanatiques,
victimes d'une mode ou de leur comportement de dépendance, l'amour d'un animal est souvent considéré
comme supérieur à l'AMOUR humain.
De là
à tomber dans la ZOOPHILIE !!! Grave de chez grave... |
|
|
Jamais deux sans trois
! Je pense à Gilbert, le garagiste Renault du bourg...
Il va penser que
je suis une abrutie. Je n’arrête
pas d’esquinter ma jolie voiture presque neuve en
percutant tantôt
un blaireau, tantôt un oiseau,
tantôt un chat. |
|
|
À quand le chevreuil
ou le sanglier ???
Je suis, à mon corps défendant,
l’instrument
du destin de trois bêtes suicidaires.
Merde ! J’y crois pas !
Je crie, je tempête,
c’est la série noire…
Je me calme... |
 |
|
|
Bof ! Ce n’est rien,
c’est la vie … la vie c’est la mort,
la mort c’est la vie ; la vie est contenue dans
la mort, la mort est contenue dans la vie ; tout est contenu
dans le tout. Il faut bien être philosophe. Ça
aide ! Ce qui m’embête dans cette histoire,
c’est la perspective de la « douloureuse »
du garagiste. Mais comme il n’y a pas mort d’homme,
ce n’est pas si grave, ce n’est rien !
En
tout cas, ça vaut mieux qu’une jambe cassée
! Il faut savoir relativiser.
Mais ça m’ennuie,
tout de même. À moi de payer les frais. Pourquoi
est-ce à moi de faire les frais
de cette bestiale succession d’actes d’autodestruction ? J’ai
vraiment d’autres chats
à fouetter que d’assumer
ce genre de problèmes. Je ne leur ai rien demandé,
moi, à ces bestioles ! Z’avaient qu’à
se garer ! |
|
|
 |
— Ça existe
vraiment les psychologues pour animaux ?
— Oui, oui, il paraît.
Ça doit coûter ! Un luxe stupide, du snobisme,
de la connerie…
— Et la facture du garagiste, c’est pour ma pomme !
Pour le reste, ce n’est
pas si grave, ce n’est rien, ce n’était
que des bêtes.
|
|
Mais, au fait, ça veut dire
quoi cette série noire ?
Jamais de la vie je n’ai tué trois bêtes l’une après
l’autre, au cours d’une même semaine.
C’est curieux tout de même. Quelle coïncidence
! Ça veut dire quoi exactement monsieur
le psychologue ?
D’ailleurs,
y-a-t-il nécessairement quelque chose à
comprendre, quelque leçon à en retirer,
quelque signe à interpréter ? Rien à
faire, je suis incapable de m’empêcher de
chercher à comprendre
la signification des événements
qui m’interpellent en raison d’une présumée
incontestable bizarrerie. Bizarre… vous avez dit bizarre ? Oui, là, pour être bizarre, je
considère que c’est vraiment bizarre |
|
|
Mais, après tout,
il n’est pas pire, pour un conducteur, de TUER involontairement
avec un véhicule automobile des animaux inconscients
des dangers de la route que, pour un chasseur,
de TUER volontairement avec une CARABINE.
C’EST LA LOI DU PRÉDATEUR !
Voilà ! J’arrête
de culpabiliser, de me torturer l’esprit avec
cette
mésaventure. Il ne faudrait pas que ça m’empêche
de dormir.
Ce n’est rien. Ce n’était
que des bêtes.
Quant à l’argent qu’il
me faudra débourser pour payer
le garagiste, comme
on dit « plaie d’argent n’est pas mortelle » ! Ce n’est rien, l’argent n’est rien. On est né sans argent dans
les poches et sans
poches d’ailleurs. On MEURT sans emporter
un centime dans l’au-delà. CE N'EST RIEN... |
 |
|
|
|
|
|
|
Dernière
mise à jour
lundi 29.01.2018 11:36
|
|
|